Tης Simone LE BARON
France
Et sert de révélateur à la crise larvée de l'Union Européenne, comme le bain qui transforme une image latente en image visible dans le domaine de la photographie. L'importance d'un pays ne se mesure pas à sa démographie ou à sa superficie mais à la pertinence de l'expression de son peuple. Et le peuple hellénique, le laos, s'est exprimé à chaque fois qu'il a senti sa liberté et son indépendance en péril. La Grèce a une histoire continue, une chaine dont chaque maillon a été porté par cette notion unique de la liberté au sens large qui engendra l'idée de démocratie comme riposte à la tyrannie.
Ce petit territoire grand comme à peu près un sixième de la France, de 11 millions d'habitants seulement, fait parler de lui encore et toujours. Cornélius CASTORIADIS (1922-1997) disait ceci :"Ce qui fait la Grèce, ce n'est pas la mesure et l'harmonie, ni une évidence de vérité comme dévoilement. Ce qui fait la Grèce, c'est la question du non-sens ou du non-être." L'Union Européenne représente une mesure et une harmonie apparentes, l'uniformité d'un système qui s'aligne sur un système mondialisé, englobant des Etats-supports tous si différents les uns des autres par leur histoire, leur situation géographique, qu'il est impossible de les mélanger pour en confectionner une pâte homogène : il restera toujours des grumeaux.
Ci-dessus la vision qui m'a traversé l'esprit comme un éclair en 1979 à Athènes, quand je fus prise d'un malaise en respirant l'air toxique diffusé par le "NEPHOS" apparu soudain dans le ciel olympien, seul attribut du dieu qui allait y régner pour les années (siècles ?) à venir, celui de la technologie quantitative et de la finance aveugle. J'avais bien compris à l'époque (comme les grands-pères grecs) le scénario du drame qui allait se jouer sur la scène hellénique. Exsangue à la suite d'une guerre civile fratricide et meurtrière, mise au ban de l'Europe par les colonels, la Grèce pauvre, en situation d'inflation et de chômage catastrophique, rejoint le Marché commun le 1er janvier 1981 à l'initiative du conservateur Kostas Caramanlis relayé en octobre de la même année par le socialiste Andreas Papandréou. Kostas Caramanlis avait restauré la démocratie après la dictature militaire et permis ainsi aux Grecs de jouir à nouveau de cette liberté ancrée dans leurs entrailles, moment de répit au sein d'un paradis sociétal, avant le joug de la CEE qui allait les garrotter dès 1981, 160 ans après la guerre d'Indépendance et la libération du joug ottoman. Puis en 1992 elle entre de plain-pied dans l'Union Européenne et en 2001 dans la zone euro : 20 ans pour se mettre au niveau des pays fondateurs qui, eux, auront bénéficié de 30 années supplémentaires (depuis le 18 avril 1951, naissance de la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier, ancêtre de la CEE) pour prendre leurs marques.
Tout est allé très vite et le peuple grec, affriolé par la technologie, les biens de consommation, le mode de vie occidental, a laissé toute latitude aux gouvernants.Un abîme s'est creusé entre les citoyens et l'Etat. L'Etat-providence a remplacé l'Etat-nation resté embryonnaire au cours du septennat de K. Caramanlis. La dictature des partis s'est insidieusement substituée à la démocratie. La corruption, le trucage des comptes publics ont provoqué la crise financière actuelle par ricochets uniquement mais aujourd'hui, la Grèce est montrée du doigt dans le monde entier. A tel point que Georges Papandréou a été contraint de répliquer aux Allemands : "Les Grecs n'ont pas la corruption dans les gènes tout comme les Allemands n'ont pas le nazisme dans les leurs".
En 1990, les conservateurs au pouvoir avaient déjà mis en place des mesures d'austérité très impopulaires qui avaient provoqué le même soulèvement que celles mises en place en ce début d'année 2010 par le gouvernement socialiste. Et c'est maintenant que se pose la question du "non-sens et du non-être" évoquée par Cornélius Castoriadis. Le non-sens est évident quand un gouvernement de droite et un gouvernement de gauche utilisent exactement les mêmes méthodes pour obvier au même problème. On se demande alors à quoi rime le clivage droite-gauche. Le non-être ? Le peuple N'EST PLUS. Il est nié par l'Etat, par un système qui le fagocite, le réduit en esclavage. A cela, le peuple grec dit non, "OXI". Il refuse de perdre sa liberté et son indépendance une nouvelle fois. Déjà l'assassinat d'Alexis Grigoropoulos (16 ans) par un policier athénien le 06 décembre 2008 avait mis le feu aux poudres. Ce ne fut qu'un prétexte à l'expression du mécontentement populaire. Du reste, le calme n'est jamais revenu dans les esprits depuis cette date. La société hellénique reste sur le pied de guerre.
Au lendemain de la seconde guerre mondiale, on avait jeté les bases de ce qui allait devenir l'Union Européenne dans le but de garantir la paix, le foyer des deux guerres mondiales s'étant situé en Europe. Pourtant, chacun sait qu'essayer de garantir la paix par une union économique est une antinomie, une hérésie. C'est même probablement le meilleur moyen de dresser les pays les uns contre les autres par la concurrence et la rivalité. Pour assurer une paix durable, il eût fallu fonder une "Union des Nations" permettant la libre circulation des biens et des personnes tout en laissant à chaque nation son autonomie économique et financière. Une Europe fondée sur des jumelages, des échanges universitaires, l'ouverture culturelle. Les Grecs le savent bien eux qui sont aussi nombreux dans la diaspora que sur le territoire hellénique; eux qui parlent de nombreuses langues, étudient, passent des doctorats, enseignent dans les universités du monde entier. Le mode de gouvernement démocratique a fait son temps sans faire ses preuves. Il est temps de lui trouver un successeur : et pourquoi pas la laocratie ?
Et pour finir, je m'en voudrais de ne pas citer Héraclite (6ème siècle av. J-C), mentor de Kostas Axelos, décédé le 4 février dernier qui fut l'acolyte de Cornélius Castoriadis : "Il faut savoir que la guerre est universelle, que la justice est une lutte et que tout arrive à l'existence par la discorde et la nécessité".
Πηγή : http://simone-le-baron.blogspot.com/
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